L'Algérie s’affranchit des importations de concentré
Dans un « état des lieux » dressé au 6 Août dernier, le Ministère algérien de l’Agriculture et du Développement Rural annonçait par voie de presse que les quantités récoltées depuis le début de l’année (depuis janvier dans les wilayas du sud (Adrar, Tamanrasset, etc.) et mi-juin dans le nord-est du pays (Skikda, Guelma)) atteignaient déjà un niveau exceptionnel, de l’ordre de 1,27 millions de tonnes métriques (mT).
« Les opérations de récolte [font également apparaître] un rendement moyen de 74,3 mT/ha, soit un accroissement de 77% comparativement aux quantités réalisées à la même période de l’année précédente où la production avait atteint 720 000 mT ». Selon le communiqué du Ministère, 530 000 mT avaient déjà été transformées à la date du 6 août, pour une production de 41 180 mT de triple concentré et 24 000 mT de double concentré ; les surfaces consacrées à la culture de la tomate d’industrie représentent cette année un peu plus de 24 450 ha, dont plus de 17 000 ha avaient été récoltés au 6 août.
A cette date, la récolte était terminée dans les régions du sud (72 640 mT, soit un rendement de 60 mT/ha environ pour les wilayas d’Adrar et Tamanrasset) mais se poursuivait au nord (Skikda, Guelma, El Tarf, Annaba, Ain Defla et Chlef).
Selon les données du ministère, la superficie mobilisée par la tomate d’industrie est passée de 16.958 ha (pour une production de 920 000 mT) en 2013 à 24.800 ha avec une production de 1,65 million mT en 2019.
La campagne 2020 a vu la mise en place d’un nouveau dispositif de traçabilité des lots livrés qui devrait permettre une meilleure fluidité de gestion et un contrôle plus facile des primes payées aux agriculteurs. Le nouveau système numérisé profitera, selon les termes du ministère, aux producteurs et aux transformateurs, puisque « les primes sont désormais versées directement sur les comptes des agriculteurs et des transformateurs, alors qu’auparavant, ce sont ces derniers qui versaient les primes de soutien aux agriculteurs, ce qui engendrait des retards de paiement pour les producteurs ».
En 2020, l’Etat accorde une prime de 4 DA au kilogramme de tomate livré à l’unité de transformation (soit 26,5 Euro ou 31 dollars US par tonne métrique), et cette dernière perçoit 1,50 DA/kg transformé (10 Euros ou 11,7 USD).
Source Trade Data Monitor LLC
Selon la presse locale, cette performance a permis au pays d’atteindre l’autosuffisance pour ce produit de grande consommation dont les importations ont pu s’élever dans le passé, selon les sources consultées, jusqu’à plus de 40 000 mT par an voire jusqu’à près de 65 000 mT. Les sources officielles soulignent le fait que pratiquement aucune importation n’a été enregistrée pour ce produit durant les deux dernières années.
Le ministère a mis en avant les efforts consentis par les opérateurs (agriculteurs et transformateurs) dans le développement de cette « filière stratégique » mais également le rôle des pouvoirs publics notamment à travers le soutien et l’encadrement technique de la filière. Selon le ministère, « cette performance notable permettra de créer une valeur ajoutée à l’économie nationale, de réduire les importations et par conséquent, de réaliser des gains en devise, en plus des perspectives à l’export ».
D’importantes difficultés en arrière-plan
Un certain nombre de voix discordantes se font cependant entendre dans l’une des plus importantes régions de production. Les agriculteurs d’El-Tarf (nord-est algérien) dénoncent la mauvaise gestion de la réception des tomates récoltées : annoncée comme exceptionnelle dans la wilaya, avec une production de 400 000 tonnes enregistrée cette année, la campagne a démarré à un rythme qui ne répond pas à leurs attentes.
Les producteurs « s’inquiètent du peu d’entrain manifesté par les six sites de transformation en activité à réceptionner leur produit, « Les files de camions et de tracteurs remplis de tomate fraîche s’allongent sur des kilomètres à l’extérieur de la plupart des conserveries sous un soleil de plomb. Les délais d’attente dépassent les 40 heures, c’est du jamais vu !», explique un producteur. Ce dernier ajoute que la situation résulte d’une démarche délibérée des industriels, qui rencontrent toujours de grands difficultés de financement de campagne et ne sont pas en mesure de faire face à leurs obligations financières vis-à-vis des « fellahs » avec lesquels ils travaillent traditionnellement. Les producteurs estiment que les quantités non récoltées du fait du ralentissement des usines sont très importantes, certains évoquant des chiffres pouvant aller jusqu’au tiers, voire la moitié de leur production.
Des situations similaires ont été observées à Chlef, dans l’autre grande région de production (nord-ouest algérien) où « les deux unités de transformation ne peuvent satisfaire les besoins [et réceptionner la totalité des lots livrés] en raison des pannes et des problèmes de maintenance que leurs équipements et machines commencent à connaître » expliquent les sources locales.
Sources : aps.dz, Trade Data Monitor LLC, liberte-algerie.com